21 mai, Blaye, sous la citadelle —Nues d'orage lavées de gris. Sur l'Île Nouvelle, entre les frênes, le soufre des ravenelles. Dans la passe l'eau chasse d'aval : plate, fondue, squames de remous que frôlent les hirondelles. Sous les murs, rondaches de rocs, écailles de nuit, foulée des menthes, voltes des moineaux dans les orges.
Durant les mois de recherche,
phase où le projet monte de sa nuit,
trop de pensées se pressent, trop
de décisions se prennent, et trop
vite pour que soient perçues leurs
prémices. Plus tard le temps de la
relecture permet de saisir, de consolider,
d'ajuster. Faute de ce travail d'appropriation,
l'œuvre cesserait de se déployer,
elle replongerait dans sa nuit, son sens
manquerait. En date du 27 mars, un paragraphe
convoque la tradition poétique des
peuples chasseurs-pêcheurs, l'appelle à témoigner,
et précise : "Un drap calligraphié rendra
honnêtement honneur aux sources retenues,
citera peuples et poètes, un drap
générique où comme dans
un mémorial, s'égraineront
les nom des groupes, voire s'ils sont connus,
des poètes, des chamans, des prophètes,
des aèdes..." Ce drap générique
ne sera pas réalisé : lors
de la réunion sur le terrain le 9
mai, l'idée n'a pas été validée.
Reste que certains textes sont voulus proches
de leur modèle, manière de
rendre la présence de ces grands ancêtres,
hommage de la communauté estuarienne à ces
frères en pêche. |