rangeant la carte et m’asseyant
contre Paul qui tient la barre
certains soirs d’été j’ai dit
adossé aux ganivelles
- aux ganiquoi ? aux
piquets si tu préfères aux
piquets qui tiennent
le sable j’ai attendu que
la lanterne s’éclaire - quelle
poésie ton truc il a dit -
pour lui tirer un mot
(aimable) c’est difficile
[silence]
la nuit gagne j’ai dit ce phare
les oiseaux s’assomment
sur la lanterne (la poésie quel
enfer devons-nous pousser
plus loin ou renoncer ?)
[silence]
la côte recule sais-tu ces
faits sont confirmés par
tous les habitants du
littoral une fois déjà ils ont
dû démonter le sémaphore au
train où vont les loups le phare n’en a
plus pour longtemps - et pas
seulement le phare - les soirs d’été
nous en chercherons un autre c’est
ce que voulait dire Hannah
(Arendt) de l’homme de lettres
en saluant la passion purement
spirituelle qui rend cette figure
si digne d’amour

réplique de Paul :

j’ai un pote dans le genre
galérien du slam le mot
à contre-courant son aïeul
a fait la grand pêche (qu’y dit)
dans tous les morutiers y avait la
Sainte-Vierge sur une planchette
chevillée pour la morue les
Basques sont plus
malins que les Bordelais
du Labrador à l’Islande
pipe en terre tricot de brume
pour en revenir aux atterrages
de La Coubre y a pas de glaces
flottantes pourtant plus d’un
s’y est perdu corps et biens
pour les horaires rendez-vous
sur slameur.com mon pote
tétanisé par le trac de l’émotion
pure à ne pas manquer l’aïeul
son tranchoir usé quand y
sera pas plus long que ma [pipe]
qu’y dit y sera temps de poser le
sac le pauvre il a fait la morue
aux sècheries de Bègles savoir
même s’il a jamais vu La Coubre
gaucher y tenait pas la cadence
ça rigole pas mon pote c’est
ce qui rend cette figure si
digne d’amour